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La
ville de Périgueux, chef-lieu de la cité des Petrocores
possède d’importants vestiges gallo-romains. Ce phénomène
s’explique par la richesse originelle de la ville romaine et les
aléas de l’Histoire : la ville médiévale s’est
développée autour de l’abbaye Saint-Front, située
sur une colline voisine de la cité romaine. Périgueux, contrairement
à Bordeaux par exemple, est une ville dont le centre actuel ne
recouvre pas la cité antique. Les remparts de la fin du IIIe siècle
(un impressionnant amoncellement de blocs issus d’édifices
antérieurs) ont été partiellement conservés
ainsi que la Tour Vésone, grand cylindre (25 m de hauteur, 20 m
de diamètre) de briques et de pierres qui formait le cœur
de l’ensemble religieux consacré à Vesunna, la divinité
protectrice. Une partie de la ville romaine n’a pas été
occultée par des constructions ultérieures. En 1959, à
l’occasion des travaux préalables à l’urbanisation
du quartier proche de la Tour Vésone, furent découverts
des restes gallo-romains de grande ampleur : riche habitation ? lieu public
? édifice privé puis public ? Les archéologues en
débattent encore. Le musée Vesunna est construit sur ces
vestiges.
L’œuvre
de Jean Nouvel
En 1993, la ville de Périgueux décidait d’édifier
un nouveau musée consacré à son passé gallo-romain.
Jean Nouvel, un architecte dont les œuvres commençaient à
être remarquées, fut choisi. L’enjeu était difficile
: comment rendre lisible et mettre en valeur près de 4 000 m2 de
fouilles archéologiques ? Comment faire comprendre ce qu’avait
été Périgueux antique ?
La solution proposée était simple dans son principe ; la
réalisation relève de la prouesse technique : une ample
toiture couvre sur 2 000 m2 une partie du site, uniquement portée
par le mur du fond et de légers piliers latéraux métalliques.
Les autres murs sont des parois de verre laissant passer la lumière,
intégrant le musée dans le jardin avoisinant. De l’intérieur,
le regard s’évade vers les frondaisons des arbres et les
nuages qui parcourent le ciel. On aperçoit la Tour Vésone
toute proche. L’éclairage naturel changeant anime les vestiges.
Avancée du toit et nature des panneaux de verres sont calculées
pour assurer des conditions thermiques stables, compatibles avec les exigences
de la conservation d’objets anciens.
Le visiteur arrive au premier étage sur une mezzanine dominant
l’espace de la domus fouillée dont le plan apparaît
lisiblement. Ici sont présentés les objets et vitrines évoquant
la cité de Périgueux. Puis il descend au rez-de-chaussée
et chemine sur des allées de bois à l’emplacement
des couloirs et passages qu’empruntaient les anciens Gallo-Romains,
mais à près de deux mètres au dessus du sol antique
ce qui permet, en vue plongeante, d’apprécier le décor
intérieur des pièces. Les panneaux explicatifs - excellemment
rédigés - à partir des éléments trouvés
sur place, présentent les principaux traits de la civilisation
gallo-romaine. Débutant ou étudiants avancés y trouveront
leur compte.
Pour ceux qui désireront y amener des élèves, rien
n’interdit d’attirer leur attention sur l’originalité
de notre époque qui est la première à consacrer des
sommes aussi importantes à la mise en valeur du passé et
à confier la réalisation du musée aux plus grands
architectes. À côté des historiens et des conservateurs
ont travaillé des scénographes et des décorateurs.
Le musée d’aujourd’hui peut aussi être une œuvre
d’art.
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Les
collections
Du chapiteau corinthien à la pince à épiler en bronze,
de l’hypocauste à la céramique sigillée, les
professeurs trouveront à Vesunna tout ce qui caractérise
l’environnement culturel et quotidien de l’Empire romain.
Selon leurs objectifs, l’âge et le niveau des élèves,
ils pourront faire identifier et comparer les objets avec ceux en usage
aujourd’hui ou essayer de faire comprendre ce phénomène
complexe qu’a été la romanisation.
Principaux thèmes abordés :
- premier étage : la cité romaine et la vie publique : vie
municipale (équipements urbains, décor…) ; le monde
des morts et des dieux (cultes officiels, dieux romains et locaux, cultes
orientaux) ; commerce et échanges… Une belle maquette de
Périgueux antique permet de localiser et de synthétiser
les données essentielles.
- rez-de-chaussée : domus et vie privée : les habitations,
les peintures murales, l’eau, les soins du corps, la nourriture,
les jeux, les activités artisanales…
Exceptionnels : l’ensemble de fresques du milieu du Ier siècle
(gladiateurs, poissons…) conservées in situ sur près
d’un mètre de hauteur ; la pompe élévatrice
à eau.
Les élites Pétrocores se caractérisaient par leur
goût du luxe et de l’ostentation : les revêtements de
marbre venaient des Pyrénées mais aussi d’Italie,
de Grèce, de Tunisie et de Turquie. Les peintres avaient été
formés en Narbonnaise par les meilleurs artistes selon les normes
classiques. Les lettres des inscriptions ont 45 cm de hauteur ce qui correspondait
probablement à des portiques de 300 m de longueur… Le nom
d’une grande famille de magistrats évergètes est connu
: les Pompeii. Reste à savoir d’où provenait l’argent
dans un Périgord aux aptitudes agricoles limitées : mines
de fer ou d’or ? forêts ? troupeaux ?
La visite du musée peut se prolonger par celles de la Tour Vésone
et du rempart romain tout proches.
Claude
Ribéra-Pervillé
Jean
Nouvel
Architecte français né à Fumel (Lot-et-Garonne) en
1945. Les œuvres de ses ateliers se trouvent dans le monde entier.
Il est spécialisé dans les équipements liés
à l’art : opéras (Lyon), centres culturels et surtout
musées. À Paris, on lui doit l’Institut du monde arabe,
la Fondation Cartier et tout récemment le Musée du quai
Branly. En Aquitaine, il a rénové l’église
Sainte-Marie de Sarlat ; les amateurs de luxe contemporain peuvent aller
à l’hôtel Saint-James de Bouliac (Gironde).
http://www.jeannouvel.com/
Musée Vesunna
20 rue du 26e RI
24000 Périgueux
05 53 53 00 92
Un service pédagogique peut prendre en charge les visites mais
on ne saurait trop conseiller à l’enseignant de se rendre
sur place avant d’y amener les classes.
Pour
en savoir plus
Sur Périgueux antique :
excellente synthèse dans Guide archéologique de l’Aquitaine,
Bordeaux, Ausonius éditions, 2004, pages 141 à 161
Sur le musée :
Élisabeth Pénisson, Vesunna, Bordeaux, Éditions Sud-Ouest,
2005
http://www.semitour.com/
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Fiche
étude
LA CITÉ DES PÉTROCORES : UN EXEMPLE DE ROMANISATION DE LA
GAULE
Jacques Baysselance
Une
cité à replacer dans le cadre de la romanisation de la Gaule
-58 /-50 : conquête
-50 / -30 : Gaule plus ou moins abandonnée par les Romains «occupés»
par guerre civile
-15 : Agrippa, ami du futur Auguste organise la division de la Gaule en
un réseau administratif de provinces et cités et trace les
bases du réseau routier
Le site de Périgueux : un village gaulois dans les collines de
la rive gauche de l’Isle avec un solide rempart de terre et peu
de constructions. La ville romaine s’installe en contrebas, sur
la rive droite, dans un méandre de l’Isle.
1. Construire une cité, un vrai projet politique et urbain
La cité romaine correspond à un projet de vie sociale et
d’organisation politique.
1.1. La ville doit «faire du citoyen» et créer un ordre
administratif : conseil municipal et magistrats.
- Un pouvoir municipal collégial, duumvirs
- Rôle essentiel de la perception des impôts pour l’État,
avec magistrats responsables sur leurs propres deniers
- Intégration des indigènes dans citoyenneté romaine
1.2. La ville doit « faire du citadin » c’est-à-dire
du « civilisé », qui vit selon des normes
- Plan orthogonal : symbole d’ordre et d’organisation, de
pouvoir qui domine et structure
- Primat de l’espace public urbain sur l’espace privé
sanctuaire de Vesunna : 120 m x 100 m
forum : 200 m x 100 m
amphithéâtre : ellipse de 100 m, 20 000 spectateurs ?
+ thermes, places, fontaines…
- Un espace public qui éduque le citadin, lui offre un décor
somptueux dont il profite dès qu’il sort ; et Périgueux
a « vu grand » : l’ostentation crée un esprit
municipal et permet éducation artistique du populaire
utilisation massive du placage de marbres colorés venus des Pyrénées,
de Tunisie, de Turquie, d’Italie…/ le Carrare est réservé
à la statuaire
fréquence des mosaïques, des décors peints, retrouvés
en très grandes quantités ; les écoles de peinture
de Narbonnaise ont essaimé dans toute la Gaule
monumentalité des inscriptions : des lettres de 45 cm de hauteur
- Existence de « confréries » se réunissant
pour faire des vers selon les meilleures règles de la rhétorique
: cf pot découvert dans les fouilles portant une inscription condamnant
à une amende le versificateur maladroit.
1.3. Une ville certainement marquée par de fortes tensions sociales
- Très grande distance sociale entre les élites et la masse
des habitants.
- Origine floue de la fortune des élites : élevage au nord
/ céréales val de Dordogne ; ferrières déjà
réputées, aurières ; autres matières premières
? rôle de la forêt ? La vie des élites suppose de très
importants moyens.
- Artisans, petits commerçants… classes moyennes de la société
romaine ?
Mais, pourtant pas de signes de révoltes sociales au 1er et 2e
siècles.
1.4. Et si la romanisation atténuait les tensions sociales ?
- L’argent de l’élite sert à investir pour maintenir
les revenus, tenir son rang / progresser dans la société,
financer l’impôt (le magistrat en garantit le paiement), évergétisme
(une dépense publique prise en charge par famille privée).
- Exemple de la famille des Pompeii à Vesuna : des «nouveaux
riches» d’origine indigène qui ont pris en charge des
constructions multiples dans l’espace public, sur plusieurs générations,
pendant des décennies.
- Cette action des élites revient à mettre le beau et l’utile
(fontaines…) à la disposition de tous, donc intègre
les pauvres dans la société entière.
2.
Le sanctuaire de Vesunna, un signe évident de romanisation
2.1. Vesunna, une déesse tutélaire locale romanisée
/ un sanctuaire dédié à de nombreux dieux. La cella
a une forme d’origine indigène : tour ronde et massive ;
elle est entourée d’un péristyle. Cette construction
selon les techniques romaines aurait été impossible avant
conquête.
Mur de blocage grossier recouvert par un appareil de petits moellons très
réguliers. Côté extérieur de la tour recouvert
d’ex-voto, de statues… Côté intérieur
décoré de marbres tenus par des agrafes métalliques.
2.2. Culte impérial
L’empereur assure la paix, il est la providence («celui qui
voit devant») de toute vie individuelle : l’énergie
bienfaitrice et exceptionnelle de vigueur qu’il déploie dans
le gouvernement mérite la reconnaissance des citoyens. C’est
moins sa personne qui est divinisée en tant que telle mais la force
qu’il représente et manifeste.
Rôle fort de l’espace public, évergétisme, respect
du «bon empereur»… des éléments qui favorisent
l’intégration de toutes les classes dans la société
et réduisent ou masquent les tensions.
3.
Une cité réduite au Bas Empire
La construction des remparts correspond à un décret impérial.
Repliée derrière ses murs soigneusement construits avec
les pierres prises sur les monuments laissés à l’extérieur,
Périgueux n’est plus une ville ouverte. Les premières
invasions barbares ne l’ont pas touchée mais le contexte
économique a changé.
http://www.ville-perigueux.fr/pagesEditos.asp?IDPAGE=75&cnf=|79D35A7F
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