Comptes-rendus de Lecture

LABORDE Pierre, Histoire du tourisme sur la côte basque (1830-1930), Edition Atlantica, Biarritz, 2001, 308 pages.

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« Le Pays Basque, la Côte basque et Biarritz ont donné lieu à de nombreux ouvrages. L’intention est de se situer ici dans le temps et d’analyser les modalités de la formation et donc de la création de ce territoire. Comment s’est-il construit. Selon quels processus ? et selon quelles particularités ? ». Pierre Laborde en quelques mots résume l’ambition de cet ouvrage qui analyse le développement du tourisme sur la côte basque. En cela l’auteur continue de scruter une région qu’il a déjà exploré de plusieurs manières depuis la rédaction de sa thèse à la fin des années 1970. Une plongée dans le passé permet de comprendre comment se crée un imaginaire qui place Biarritz et les villes balnéaires proches parmi les stations les plus recherchées, hier comme aujourd’hui.
P. Laborde ne fait pas une analyse chronologique du tourisme sur la côte basque. Comme son objectif est de montrer les modalités de la formation d’un ensemble touristique littoral, il prend le parti de développer des thèmes qui éclairent l’essor des stations balnéaires entre 1830 et 1930 tout en soulignant les principales évolutions entre ces deux dates. Certains thèmes abordées sont connus. La reconnaissance de la côte basque comme région touristique de caractère international repose plus sur la proximité de Bayonne et de l’Espagne, sur la présence régulière de certains souverains que sur les éléments physiques et le climat. S’y ajoutent l’intérêt grandissant pour les bains de mer, l’accroissement du nombre de personnes qui peuvent accéder au tourisme et surtout des facilités de déplacement. Sur tous ces points on trouve des données précises, des descriptions approfondies et des reproductions de documents de l’époque.
Le principal apport de ce travail tient aux éléments qui montrent la transformation de la société locale et des paysages. Les deux derniers chapitres traitent plus particulièrement de cela en abordant les rapports entre « tourisme et urbanisme » et la « création des paysages urbains, balnéaires et néo-basques ». Cependant, l’ensemble de l’ouvrage offre des détails sur la manière dont la population locale se conduit face aux touristes, sur la multiplication des emplois liés au tourisme, sur le passage d’un tourisme des élites à un tourisme plus diversifié, sur les stratégies municipales pour accompagner ou précéder le succès. Trois institutions assurent le prestige d’une station, - l’établissement de bain, le casino et l’hôtel -, et exigent des investissements importants. Si les municipalités accompagnent cet essor des équipements de prestige, ceux-ci sont financés par des capitaux privés, locaux puis nationaux voire internationaux.
La carte de 1888, représentant le Pays Basque et ses principales infrastructures de communication, s’intitule « Bayonne – Biarritz – Cambo ». Cela témoigne de l’importance de quelques lieux dans l’essor du tourisme entre 1830 et 1930. Le succès du tourisme à Biarritz déborde très largement sur les communes proches. L’ouverture d’un établissement de bains à Biarritz est suivi immédiatement par l’inauguration de ceux de Saint-Jean-de-Luz et Guétary. De même, l’apparition d’un casino à Biarritz pousse les autres stations à faire de même. Il y a une véritable émulation entre ces stations balnéaires et si Biarritz demeure au sommet de cette organisation, c’est ainsi que se constitue une Côte Basque vouée à l’activité touristique et de renommée internationale.
Sous l’effet des embellissements réalisés par les municipalités, des investissements du secteur privé et de l’essor de la construction, Biarritz, Saint-Jean-de-Luz et Hendaye passent du statut de bourgs et de ports de pêches à celui de villes. Malgré quelques grandes opérations immobilières qui orientent le développement de l’espace urbain, c’est le règne du laisser-aller en matière, surtout entre 1919 et 1929. Cela donne, malgré tout, aux stations, surtout à celle de Biarritz un éclectisme assez remarquable en matière de styles architecturaux, même si la villa basque s’impose et se propage dans bien d’autres régions touristiques. On comprend que les municipalités actuelles souhaitent préserver une telle richesse et une telle variétés de paysages urbains.
Soulignons pour terminer l’abondance et la variété de l’illustration provenant des collections de Musées, des collections privées et des propres fonds documentaires de l’auteur. Certes la qualité de la reproduction par l’éditeur n’est pas parfaite, mais on saisit mieux grâce à ces gravures les atouts de cette Côte basque (voir à ce sujet l’affiche de la Compagnie du Midi p .171), l’ampleur des transformations (les gares monumentales, les hôtels et les grandes villas…).

Jean Paul Charrié